Atterrissage en montgolfière à Philippeville
Voler en montgolfière n'était certainement pas plus facile dans les années 70, mais c'était parfois étonnant et dans certains cas très inattendu.
Voyez plutôt: lors d'un décollage que nous effectuions depuis les berges des Lacs de l'Eau d'Heure, un soir de juin 1979, alors que nous bénéficions de conditions atmosphériques avenantes, avec un peu de vent tout de même... Nous survolons Philippeville, puis fin du vol et atterrissage "sportif" (entendez: rapide!) au lieu-dit "Bois du Roly".
Mais d'abord, pour comprendre notre histoire, un petit rappel préalable pour nos "jeunes" lecteurs: les téléphones portables et les gps n'existaient pas encore à cette époque! Comment faisait-on après un vol en ballon pour récupérer pilotes, passagers et matériel de vol? La solution la plus couramment adoptée par les pilotes étaient de se définir un numéro de téléphone dit "de récupération" (c'était en général un de nos parents très casaniers qu'on était sûr de trouver près de son téléphone fixe à la maison). Les pilotes, après l'atterrissage, appellaient ce numéro de téléphone, et expliquait où ils avaient atterri. L'équipe de récupération du ballon (qui généralement avait perdu toute trace du ballon, rappelez vous, pas de gps!!) appellait, elle aussi, depuis une cabine téléphonique publique, les parents de garde au numéro de téléphone "de récupération", et le tour était joué! Des talkies walkies existaient déjà dans les années 70, mais ce matériel radio était très couteux, fragile à emporter dans une montgolfière, et nous n'en étions donc pas équipés.
Ce soir de juin allait finalement nous réserver de bonnes surprises. Dès après l'atterrissage cependant, la question se posa: d'où téléphoner? Aucune maison en vue, seule une faible lumière assez loin. Nous décidons donc de marcher jusque là, pour être finalement accueillis, très chaleureusement en fait, dans une grosse ferme partiellement cachée dans un vallon. Le fermier et son épouse, super sympas, nous utilisons leur téléphone, et notre lieu d'atterrissage est communiqué à nos parents "de garde" ce soir-là.
Le fermier voulait des anecdotes de vols en montgolfières, et après quelques bières généreusement offertes, nous étions volubiles. Une heure plus tard, notre équipe de récupération ne se montrait pas: nouveau coup de fil "aux parents": tout allait bien, l'équipe de récupération avait bien téléphoné elle aussi, leur véhicule était en route vers nous. Nouvelle heure d'attente.
Les fermiers et leurs enfants allaient dîner, et nous proposèrent généreusement de partager ni plus ni moins qu'un plantureux steack frites salade avec eux! Voilà, c'était prêt, et il eut été malvenu de refuser. Le meilleur, le plus délicieux steack frites depuis longtemps, on s'en rappelle encore!
La fin de l'histoire: alors que nous en étions arrivés au dessert, notre équipe de copains-récupérateurs arriva enfin, épuisée: mais que leur était-il donc arrivé? Tout simplement un pneu crevé en pleine campagne isolée, sur une route déserte sans lumière. Impossible de trouver une cabine téléphonique à proximité pour appeler les pilotes et les avertir que l'équipe de récupération allait avoir un sacré retard: priorité à la réparation, donc désatteller la remorque de transport du ballon, trouver le cric (il fait noir!), changer la roue, réatteler la remorque, et repartir enfin!
Inutile de vous dire qu'on s'est fait un plaisir d'inviter nos deux courageux récupérateurs à un succulent repas dès le lendemain soir....